Le mercredi 12 août 2020 de 18h30 à 20h30, lecture collective d'Autobiographie de ma mère (1996) de Jamaica Kincaid.

Tout l'été, nous vous invitons à lire ensemble dans le jardin du CRAC Alsace. Pour participer à cette lecture collective, réservation et renseignements auprès de Richard Neyroud à l'adresse r.neyroud@cracalsace.com ou par téléphone au 03 89 08 82 59.

«Le présent est toujours parfait. Quel que soit le bonheur ressenti dans le passé, je ne le regrette pas. Le présent est toujours le moment pour lequel je vis. L'avenir, je ne le souhaite jamais, il viendra ou il ne viendra pas, un jour il ne viendra pas. Mais cela ne me menace pas, je ne suis jamais en état d'anticiper. L'avenir n'est même pas comme l'espace noir au-dessus du ciel, où brille une étincelle de lumière intermittente; c'est bien plutôt une pièce sans plafond ni sol ni murs; c'est le présent qui lui donne une telle forme, c'est le présent qui l'enferme. Le passé est une pièce pleine de bagages et de déchets et parfois de choses utiles, mais si elles sont réellement utiles, je les ai conservées.»*

Jamaica Kincaid, née Elaine Cynthia Potter Richardson le 25 mai 1949 à Saint John's en Antigua-et-Barbuda, est une écrivaine américano-antiguaise. Elle enseigne et réside actuellement aux États-Unis. Elle quitte l'île d'Antigua à seize ans pour s'installer à New York. C'est en 1973 qu'elle adopte le nom de Jamaica Kincaid et, dès l'année suivante, soumet régulièrement des articles au magazine The New Yorker, dont elle devient rédactrice attitrée en 1976. Ses romans sont le plus souvent autobiographiques et font une large place aux relations familiales influencées par l'histoire coloniale.

«Le fait que 'ces gens' soient nous-mêmes, qu'on insiste sur la méfiance envers les autres, qu'on apprenne à des personnes qui se ressemblaient tellement, qui partageaient une histoire commune de souffrance, d'humiliation, d'esclavage, à se méfier les unes des autres, même dans l'enfance, n'est plus un mystère pour moi. Ceux dont nous aurions dû naturellement nous méfier était totalement hors de notre portée; ce dont nous avions besoin pour les vaincre, pour nous débarrasser d'eux, était beaucoup plus puissant que la méfiance. La méfiance à l'égard d'autrui n'était qu'un des nombreux sentiments, tous à l'opposé de l'amour, tous remplaçant l'amour, que nous éprouvions les uns pour les autres. C'était comme si nous étions en compétition pour un prix secret que nous avions peur de voir remporté par quelqu'un d'autre. Aucune expression d'amour, alors, ne pouvait être sincère, car l'amour pouvait donner l'avantage à l'autre.»**

* Jamaica Kincaid, Autobiographie de ma mère, Éd. de l'Olivier, 1996 (réédition 2016), p.171.
** Ibidem, p.43-44.